L’invasion de l’Ukraine est une tragédie humaine pour les populations locales. Loin et proche à la fois, le conflit provoque également des tensions notables sur la volatilité des prix et sur le pouvoir d’achat en Europe. La Suisse n’échappe pas à la règle.
Tout se résume en trois lettres : AME
A pour Alimentation
L’Ukraine est un acteur important en matière d’agriculture. Sa production agricole fournit notamment les ingrédients servant à l’alimentation des volailles, des porcins et des bovins, en Ukraine et au-delà.
Qui dit manque de nourriture pour les animaux d’élevage dit production en baisse des produits alimentaires tels que le lait, le fromage, le porc, les œufs etc…
Qui dit baisse de l’offre face à une demande stable voire croissante dit augmentation tarifaire dans les points de ventes.
À cela se rajoute une chute des exportations ukrainiennes en matière de maïs, de céréales, de graines de tournesol… Le prix de la farine et de diverses huiles en pâtit.
Plus inquiétant, le véritable manque de matières premières pour les pays pauvres du Moyen-Orient ou d’Afrique.
Nous devrons faire face à des prix plus élevés dans nos supermarchés locaux mais la situation peut devenir dramatique pour des populations plus fragilisées.
M pour Métaux
Nickel, Lithium, Cobalt… autant de métaux essentiels pour la fabrication de nos appareils. Batteries de voitures électriques, téléphones portables, ordinateurs, appareils ménagers… tous nécessitent des composantes électriques dont les fameux semi-conducteurs.
L’Ukraine est une terre fertile pour ces types de métaux, tout comme la Russie d’ailleurs. Les deux pays subissent dès à présent les effets du conflit, une chute des investissements et une baisse de la capacité industrielle.
Cet affaissement de l’offre vient empirer une situation déjà critique en matière de ressources disponibles pour les fabricants à travers le monde.
La pandémie est déjà passée par là, des retards liés aux problèmes structurels des chaînes d’approvisionnements mondiales perdurent, les catastrophes climatiques furent dévastateurs dans certains États producteurs américains… La somme de tous ces événements tend encore davantage une situation industrielle déjà volatile.
Le prix de ces appareils n’a pas augmenté dans les mêmes proportions que l’alimentaire mais le risque reste élevé.
Sans une capacité financière suffisante pour faire face à des retards de livraisons, et donc des retards de paiements ; sans trésorerie pour compenser le manque à gagner des stocks de matériel dormant… il y a un risque de faillite pour de nombreuses entreprises. Cela a comme conséquence des licenciements massifs potentiels.
E pour Énergie
Vous l’aurez remarqué, le prix à la pompe ne cesse de croître. Faire un aller-retour Lausanne-Genève commence à peser lourd dans le portefeuille.
Le coût pour vous chauffer est encore raisonnable. Merci le printemps, merci l’été. Reste à voir comment les pays qui dépendent du gaz russe feront pour assurer son approvisionnement et assumer le nouveau prix de vente cet hiver.
Là encore, le jeu de l’offre et la demande bat son plein.
Pour le coup, c’est la Russie qui décide de limiter ses exportations de pétrole et de gaz en réponse aux sanctions prises par les occidentaux contre les forces politiques du pays.
Ironie du sort, jamais les autorités russes ont tant profités de revenus émanant de la production de pétrole et du gaz. Non seulement soupçonnons nous que le marché asiatique compense quelque peu la baisse des achats européens mais l’augmentation des prix compense également massivement la baisse du volume exporté.
Qu’en est-il pour la suite ?
Personne ne le sait ; les mesures préventives et les projets d’investissements seront-ils suffisamment massifs et rapides dans leurs effets que pour contrôler la hausse ? Les experts en doutent.
Tant que la guerre se prolonge, les effets tarifaires pour faire le plein de votre véhicule ou le plein de votre cuve à mazout continueront à se faire sentir. Il en va de même si vous chauffez votre bien immobilier au gaz.
Les mauvaises nouvelles ne venant pas seules, le prix du transport de marchandise explose. Il en va de même pour le coût à la vente de ces mêmes produits. Les effets de la globalisation sont parfois positifs tant la croissance pour des pays en voie de développement est notable. Le contraire est vrai aussi. La chute pour ces mêmes pays peut s’avérer brutale. Les pays riches trouveront des mécanismes pour surmonter une crise ; les autres pays qui dépendent lourdement des exportations et du tourisme, souffriront davantage.
Une lueur d'espoir ?
Pas vraiment. Avant même le début du conflit, l’inflation était réelle et mondiale. Pour tenter d’inverser la courbe, les autorités financières américaines et européennes décidèrent d’augmenter les taux d’emprunt.
En résumé, l’argent coûte plus cher, vos achats journaliers coûtent plus cher, vos voyages coûtent plus cher, vos déplacements coûtent plus cher et vous devez parfois attendre des mois avant de vous faire livrer un appareil électrique ou un nouveau véhicule.
L’arrêt du conflit, une période prolongée d’apaisement politique et un retour à un semblant de normalité dans les relations internationales… voici les seules options permettant d’anticiper l’avenir économique avec un peu plus de sérénité.
AME ou âme ?
Certes, le portefeuille souffre un peu. Des choix de consommation s’offrent à nous. Moins manger de viande, moins de déplacements en voiture, une destination de voyage plus proche… est-ce réellement urgent d’avoir le dernier iPhone ou la dernière Volvo ?
Des choix de luxe.
Nous avons bien entendu le droit de nous inquiéter de nos modes de vies, des prix et des contraintes. Pour certains, même en Suisse, la situation peut vite basculer et la précarité peut s’installer.
Cela-dit, rien n’est comparable à ce qu’endurent les populations locales en Ukraine ni même ce qu’endurent les familles de soldats russes sous le coup d’une avalanche de propagande et de mensonges.
Ayons donc une pensée pour ces personnes qui ne disposent pas des choix qui sont les nôtres. Soyons solidaires avec nos voisins en Suisse qui souffrent davantage, soyons solidaires avec les ukrainiens qui se battent pour la survie de leur nation et montrons de la compassion pour toutes les personnes souffrant dans ce conflit.
Que nos âmes soient bienveillantes tant celles des dirigeants, notamment en Russie, ne semblent pas l’être.
‘We share the same biology, regardless of ideology
But what might save us, me and you
Is if the Russians love their children too.’
Sting - Russians | 1985